Petite pensée aujourd’hui pour Bill Loko.
Je me suis réveillé ce matin en écoutant des chansons de Bill Loko. Du nectar pour commencer la journée.
Pendant la majorité des artistes cherchent la renommée, lui a décidé de la fuir.
Comme une comète, Bill Loko fit son apparition dans la musique camerounaise vers la fin des années 1970 et disparut aussitôt vers le milieu des années 1980.
Ce génie était très en avance sur son temps. Il a opéré une révolution fondamentale dans le Makossa en introduisant un Makossa rythmé par le piano et les synthétiseurs. Visionnaire sensible aux influences musicales de son époque, il a opéré un syncrétisme original en introduisant dans le Makossa des rythmes en vogue telle que le Funk et le disco. Avec le soutien de son complice Michot Dhin, il a produit des chefs d’œuvre en l’espace de quelques années. En 1980, le titre Nen Lambo apparut comme un coup de tonnerre et connut aussitôt un succès retentissant.
Bill Loko a été repéré par Ekambi Brillant autour des années 1970 lors d’un concours de musique auquel il participait. Ekambi Brillant a été séduit par son jeu de guitare et la qualité de sa voix. Bill gagne la compétition et Ekambi Brillant vient dans les coulisses en criant et en pointant un doigt dans sa direction : « Hey toi ! arrête de chanter et donne-moi ces chansons, je les veux » . Bien qu’il n’avait que 14 ans à l’époque, ils se sont liés d’amitié et Ekambi Brillant est devenu instantanément comme un grand frère, un mentor. Ekambi Brillant choisit même une composition de Bill Loko qu’il enregistre dans son nouvel album. Cette reconnaissance de l’ainé rend le jeune Bill Loko très fier.
Les Parents de Bill Loko décident de l’envoyer poursuivre ses études en France. Il arrive à Paris en 1976 et fait la rencontre du très talentueux poly instrumentiste Michot Dhin, un ami du Cameroun. Les deux amis se mettent à jouer ensemble à leurs heures perdues. De cette collaboration naitront les tubes Nen Lambo et Salsa Makossa. Ils sont accompagnés dans cette aventure par Claude Vamur et Jean-Claude Naimro (futurs membres des Kassav) qui sont des membres de ce qu’il convenait d’appeler à l’époque « l’équipe nationale du makossa ».
Mais Bill Loko faisait avant tout de la musique pour le plaisir. Il ne la faisait pas pour la gloire ; pour ce brillant universitaire la musique était un loisir. En 1980, lorsque parait le titre Nen Lambo, le succès est au rendez-vous.
Bill Loko est surpris par ce succès inattendu ; lorsqu’il se déplace dans les rues de Paris il est assailli par des foules de gens qui réclament des autographes : « Le moins que je puisse dire, c’est que le succès m’a pris par surprise. À un moment donné, marcher dans les rues de Paris, surtout à Clichy, est devenu un problème. Les gens affluaient de partout pour me demander des autographes ; ce n’était pas quelque chose avec laquelle je me sentais à l’aise et j’ai surtout essayé de m’éloigner aussi vite que je pouvais. Le truc avec la gloire, c’est que vous plongez et que vous soyez submergé par les vagues ou que vous vous retirez. J’ai choisi de me retirer et je me suis assuré que personne ne savait où je vivais. Et je dois blâmer tout cela sur Ekambi Brillant […] La célébrité n’est pas venue progressivement, c’est venu comme ouragan. Je sentais ma vie privée entravée et je ne pouvais pas la contrôler. » confiait -il à Déni Shain e Analog Africa ;
Un jour alors qu’il devait se produire dans une discothèque à Marseille, il vécut une scène mémorable : « Une superbe blonde a commencé à enlever vêtements et avant même que je le sache, elle était sur scène nue. C’était incroyable ! Super ambiance. Vers la fin du concert, des gars qui avaient été les gardes du corps de Johnny Hallyday m’ont entouré et escorté comme si j’étais Johnny lui-même. Mais moi, je voulais juste faire la fête avec les invités. J’ai commencé à discuter avec eux en leur disant de mettre fin à ces absurdités » ; Bill Loko est désormais invité partout et n’a même plus du temps pour se consacrer à ses brillantes études. Submergé par cette célébrité dévastatrice, il décide d’aller se refugier dans un pays du monde où il ne sera pas reconnu et où il pourra poursuivre ses études dans l’anonymat.
Bill Loko a réalisé des mélodies atemporelles parmi lesquelles on peut citer : Salsa Makossa, Dipita, Ndolo, Tika Ndolo, Muaye, Malinga, Mina Ma Ndutu, Africa Wake Up.
Avec trois albums (Nen Lambo (1980), Dipita (1981), Africa Wake Up (1986)), il a estampillé son nom en lettres dorées dans le livre d’or de la musique camerounaise.
Au sujet du titre « Salsa Makossa » ; on peut lire dans les critiques de l’époque « Lorsqu’on écoute Salsa Makossa, on sent une domination de l’électronique, faisant de cette musique celle de l’avenir car, je me dis parfois que la place de Bill Loko est déjà réservée dans l’avenir. Tout le monde l’aime, même sans le vouloir. Il vous suffit, en passant près d’une discothèque, d’écouter Bill Loko pour tomber d’admiration devant ce feeling, ce plaisir sans cesse renouvelé »
Quelle est votre chanson préférée de Bill Loko ?
Moi j’aime toutes ses chansons sans exception !
Sources : Les Icônes de la Musique Camerounaise, Arol Ketchiemen ; Pop Makossa, Analog Africa
Arol Ketch – 02.06.2021
Fourmi Magnan égarée